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Les mots de Arthur Simony

26.12.2024
 Je  crois  que  dans  ce  monde  de  plus  en  plus  virtualisé,  il  est  important  de  continuer  à  créer  avec  son  corps 

Arthur Simony est un jeune artiste autodidacte de 34 ans, et « papa d’une merveilleuse petite fille » comme il le souligne. Parisien, il a choisi de mettre son art à la disposition de tous, dans la rue. Il a testé sur les encombrants qu’il customisait, puis réalisé des fresques participatives, tout en ayant un travail sur toile qu’il expose en galerie. Il travaille sur et avec les mots, leurs « puissances », leurs formes et significations. Un travail poétique et fédérateur.

Il a réalisé début avril une fresque sur une palissade qui entoure les travaux de la rue de Trévise à Paris, comme suite à la terrible explosion. Ce sont des milliers de « ensemble » qu’il a inscrit en noir sur fond blanc. Le 6 avril, il a invité les passants, badauds, amis et enfants à colorier ce mot, tous ensemble.

Vos dessins sont aussi simples que le message est simple, c’est un choix ?  

Je ne dirais pas que c’est un choix mais plutôt une tendance naturelle que j’applique inconsciemment et qui est liée à ma façon d’être avec moi-même et avec les autres. J’aime les choses simples parce qu’elles sont vraies. Mais les choses simples sont souvent compliquées. C’est compliqué d’être simple ; c’est difficile de faire des choses simples. Les choses simples sont rares aujourd’hui.

Vos dessins représentent beaucoup d’heures de travail, ça vous a paru évident de les partager, et inviter les passants à le compléter sur la palissade ?

En tant qu’autodidacte, j’ai toujours attaché beaucoup d’importance à l’approbation des autres quant à mon travail. Je pense que c’est cela qui m’a amené à faire participer les gens à mes œuvres. Il y a toujours eu, ou très souvent en tout cas, une dimension participative dans mon travail.

J’ai eu une période pendant laquelle je produisais uniquement sur les encombrants dans la rue. C’était au passant de juger si cette porte d’armoire ou cette planche en bois qui traînait dans la rue et sur laquelle j’avais dessiné, méritait d’exister, soit il l’emmenait avec lui, soit il la laissait partir à la déchetterie.

Plusieurs fois aussi dans mes expos, les observateurs étaient invités à devenir acteur de l’œuvre, avec toujours un message comme mon installation « Décrocher les étoiles«  où chacun était invité à décrocher son étoile en gravissant les marches d’un escabeau pour couper un fil au bout duquel était simplement écrit le mot « étoile« . Concernant la palissade de la rue de Trévise, ça m’a effectivement paru évident que chacun puisse participer. Aussi beaucoup du fait de la nature de l’événement* autour duquel on m’a demandé de travailler. C’est aussi pour cela que j’ai décidé de travailler sur le mot « ensemble« .

[* Le 12 janvier 2019 une explosion due à une fuite de gaz à endommagé plusieurs immeubles de la rue.]

Il y a un côté « développement personnel » dans votre travail, le Posca est un outil pour s’émanciper ?

Le Posca, c’est un feutre. J’aime beaucoup travailler au feutre. C’est simple, c’est naïf, c’est agréable, ça glisse, c’est coloré et c’est efficace. Le feutre, c’est l’outil préféré des enfants pour dessiner, aussi parce que souvent, on interdit le feutre aux enfants – en tout cas sans surveillance. Et ça en fait un objet d’autant plus jouissif lorsqu’on peut se lâcher avec…

Aujourd’hui, l’outil est virtualisé et devient une extension de l’esprit, alors qu’il avait toujours été jusqu’ici une extension du corps. Je crois que dans ce monde de plus en plus virtualisé, il est important de continuer à créer avec son corps. Le Posca est aussi pour moi un outil qui fait partie de mon quotidien depuis que je suis ado.

Quelle est la plus belle réaction que vous ayez vue par quelqu’un devant une palissade ? 

Il y a beaucoup d’enfants qui sont venus participer. Ils ont été hyper réceptifs, c’était surprenant et ça m’a beaucoup touché. Mais je crois que les adultes ont été encore plus touchants. J’ai senti que reprendre un feutre en main, colorier un dessin, leur faisait beaucoup de bien. J’ai senti que c’était quelque chose qu’ils n’avaient pas fait depuis longtemps, ça les a rapproché d’eux-mêmes. Certains ont fait fait un bond de 40 ans en arrière.

Le temps d’un coloriage, ils ont oublié leur routine, leurs problèmes, leur smartphone, et ils ont pris un moment pour eux, hors du temps. On aurait dit qu’ils redevenaient des enfants, et ça c’était très touchant. Aussi, certains « jeunes cadres dynamiques pris dans le rush de la société » ont passé plus d’une heure le samedi à remplir ces espaces vides avec des couleurs ; et ils sont revenus le lendemain pour continuer.

Quel est le « truc » pour réussir un tel événement ?

Un max de bienveillance.

Arthur Simony est sur Facebook et il a un site web.

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