« Je suis originaires de la Guadeloupe, j’ai 35 ans et j’ai commencé à dessiner très très jeune. Je n’ai pas appris à dessiner, dès que je dessinais, je dessinais. À trois ans, le premier dessin que j’ai fait c’est une Tortue Ninja, et je l’ai réussi. À 7 ans, j’ai commencé à faire des portraits. Quand je commence à travailler sur un truc je ne me donne pas de limites, je vais expérimenter. Bien souvent je vais faire des erreurs, et c’est grâce à ces erreurs que j’apprends beaucoup. »
Voilà comment se présente Artwhos, un artiste/illustrateur dont les paires de sneakers customisées sont de véritables œuvres d’art. On a eu la chance de le rencontrer, et exceptionnellement on a eu le droit de voir son petit atelier au cœur de Paris, au premier étage d’un concept-store multi-services, de la gravure sur cuir à la découpe minutieuse de bois. On lui a posé quelques questions.
Pour commencer, j’ai un oncle qui est artiste, et ma mère fait de la peinture, ils ont été mes premières inspirations. Pour les baskets, avec mon frère on aime ça depuis longtemps, mais pas dans la tendance de faire la queue pour acheter une paire, en Guadeloupe on fait pas ça ! Je les vois au magasin d’en face [il le désigne], ils dorment parterre pour acheter des baskets !
Bref, la première paire que j’ai customisée c’est des vieilles (Nike) Air Force. Avec un de mes frères, on a commencé avec des Posca, j’ai utilisé deux couleurs, une normale et une métallisée, et j’ai réussi à faire une belle paire. Mon frère m’a dit : « Waouh ! on dirait que tu as toujours fait ça ! » Il était choqué ! Je ne savais pas ce qu’il fallait utiliser, s’il fallait vernir ou pas, on est resté dans l’expérience.
Il y a quelques années, j’ai fait une paire avec un motif léopard et je l’ai montrée à un ami qui a un studio de musique. Il a montré ça à un rappeur, Abdallah, et le gars a voulu une paire. Moi, je ne connaissais pas le principe de faire des choses pour des gens connus pour se faire connaître. Il a mis la paire dans son clip, dans lequel on me voit dessiner sur les baskets et lui donner, et ça a fait deux millions de vues. Et là, les gens ont commencé à me harceler ! On m’a demandé 30/40 paires !
Je ne suis pas à l’aise de faire des choses pour des gens connus, je ne veux pas utiliser leur image pour me faire connaître, et en même temps l’art il faut le partager, le montrer, c’est important. Pour Cristiano Ronaldo, c’est sa sœur qui a commandé la paire pour son anniversaire dans une boutique avec qui je travaillais. Il pouvait pas vraiment les mettre car il est sous contrat avec des marques, mais il a quand même mis la photo sur Instagram, et là, il y a eu des likes !
Pour Booba, j’ai fait deux paires. La première, c’était une patine avec Maître Yoda sur une Air Force entièrement en cuir, même la semelle, j’ai même fait une boîte en bois. On s’est vus ensuite pour qu’il la récupère. La deuxième c’est avec Batman, quand il a sorti le clip Gotham. J’avais déjà fait Batman (photo ci-dessus) sur des sneakers, donc je les ai mises sur Insta en taguant Booba. Il n’avait pas mon contact direct donc il est passé par un ami commun pour que je lui fasse une paire dans le même genre. Ensuite, on a collaboré pour d’autres projets dans le même genre.
C’est une collab avec un ami qui est peintre, que j’ai mis deux ans à faire. J’ai mis de l’intention dedans. Il y a un tigre et un dragon, avec un paysage et beaucoup de couleurs. D’ailleurs les photos sont faites par mon pote Benjoy qui a des idées de mises en scène et c’est toujours très réussi.
Il faut savoir discerner deux choses : Est-ce une œuvre d’art ou alors une paire que tu vas porter ? Une paire que tu vas porter, il ne faut pas mettre trop de couleurs parce qu’elle doit plaire à d’autres personnes et elle va être associée à des vêtements. Une œuvre d’art, c’est brut, on retranscrit ce que l’on a dans le cerveau, ça n’est plus une paire de chaussure. Il faut juste savoir jauger pourquoi vous faites la paire et pour qui vous la faites, c’est une question de sensibilité.
Waouh ! L’année dernière j’en ai fait 2000 ! et ça fait des années que je fais ça, je ne peux pas compter !
Non, pas vraiment. Je connais les codes, je travaille sur les chaussures et les sneakers, mais je ne me limite pas qu’à ça. Je travaille sur des lunettes, sur des vêtements, des vestes, il n’y a pas de limites. Faire une seule activité ça m’ennuie.
(Rires.) Il y a une inondation d’images, c’est bien et pas bien, mais quand il y a trop d’informations on retient rien du tout. À cause de ça, on va juste survoler les choses. Les gens qui observent un tableau ils vont pas se poser 15 minutes pour regarder, jamais de la vie ! Ça dure deux secondes et ils zappent ! Il faut essayer de se déconnecter de tout ça !
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Les photos sont de Benjoy