Senor Octopus, comme son nom l’indique, a une lubie assumée pour les poulpes (octopus en anglais), et surtout leurs tentacules. À Montpellier, cette illustratrice est tatoueuse depuis quelques temps, une évolution logique de sa pratique sur papier, et on retrouve donc parfois des pieuvres en liberté sur des épaules ou des avant-bras qui batifolent sur la place de la Comédie. On a remarqué son travail depuis longtemps, on vous propose d’en savoir plus sur sa passion pour les membres à ventouses de ces céphalopodes marins qui n’ont pas encore livré tous leurs secrets.
https://www.instagram.com/snr_octopus/
https://www.behance.net/Senoroctopus
retrouvez Senor Octopus au salon de tatouage NEIGE NOIRE
Mes inspirations sont trop nombreuses à résumer, tant du côté des artistes que des thématiques. En ce moment, niveau illustration, je regarde beaucoup les travaux de Ian McQue, Sorie Kim et l’indétrônable Dulk. Et j’ai la chance d’être entourée d’amis et de collègues tout aussi inspirants, sans compter la scène artistique montpelliéraine qui est ultra-vivante et créative.
Du côté du tatouage, j’aime les univers de Docteur Lulu et Lahhel pour les Français, Kelly Violence pour son dot [dot art : image formée d’une multitude de points – ndr] et ses pièces magistrales, et aussi Mare. Il y a aussi BLK qui est juste dingue avec ses mouvements et son abstraction. Et je pioche du côté de la gravure, de la peinture classique, de la BD. Sinon mes thématiques de prédilection sont aussi vastes que mes inspirations, on part de la nature, la faune, la flore, l’espace, en passant par l’architecture, la pop culture, le fantastique, l’absurde et le gras.
Quand j’ai commencé dans l’illustration, en grande timide que je suis, j’aimais l’idée de me créer un alter ego artistique. Obsessionnelle de l’iconographie mexicaine à mes débuts et du poulpe, pour toujours, c’est avec ce genre de dessins que j’ai commencé. J’aime beaucoup le travail de motif qu’on peut effectuer autour des tentacules. Ça me permet de suggérer la présence de l’animal sans le représenter entièrement et de l’adapter à de multiples supports.
Ce pseudo était tout trouvé. Maintenant que je tatoue le Senor de mon pseudo amène souvent à des situations assez drôles où mes clients s’attendent à se faire tatouer par un homme. Mais paradoxalement, cette androgynie dans ce nom à un rapport avec moi et mon style graphique qui me permettent de tatouer à égalité hommes, femmes et tous ceux qui se situent au milieu.
« Alors je dirais qu’il faut prêter une grande attention à la fluidité de la courbe qui sera la matrice du tentacule, ainsi qu’au rythme et à la régularité des ventouses car les décalages se voient tout de suite. Il ne faut pas hésiter à créer des courbes et des contre-courbes, et ne pas montrer qu’une seule face du tentacule, alterner entre des zones où les ventouses sont visibles et des zones où on ne les voit pas.
Globalement, il y a plein de manières de les représenter, selon les artistes et en s’inspirant de la nature elle-même. C’est en faisant la somme de toutes ces influences qu’on crée sa propre manière d’en dessiner ! »
C’est un animal ultra-complexe et très intelligent, presque mystique, avec des caractéristiques assez folles comme sa grande curiosité, sa capacité à se camoufler en créant des motifs incroyables, et bien sûr le rapport à l’encre qu’il projette et qui le rapproche de ma passion pour le dessin. Cerise sur le gâteau, il y a quelques années, des scientifiques ont découvert des parts d’ombre dans son génome qui suggèrent une origine extraterrestre. Pour une grosse obsessionnelle de l’espace que je suis, cette information n’a fait que confirmer mon amour pour cet animal.
Je mentirais si je disais que c’était un projet que j’avais envisagé. Mais j’ai eu la chance d’être encouragée dans cette voie par des amis et connaissances qui avaient un pied dans le milieu, et formée par Selrak qui m’a quasiment tout appris et avec qui je travaille encore dans la stupidité et la bonne humeur. En me lançant, j’étais loin de m’attendre à tous les paramètres qui constituent une session de tattoo – réussie. J’ai découvert un univers et une pratique incroyable dont la richesse ne cesse de me surprendre. Le rapport aux clients et à leur corps, la confiance qu’ils nous font pour les encrer à vie, ainsi que les rencontres et l’inspiration renouvelées que ça engendre.
C’est très différent de ma pratique de l’illustration qui était beaucoup plus solitaire et confortable. Mais je ne reviendrais pas en arrière malgré mon amour de l’ermitage en pyjama et des séries. Au niveau du « support », c’est clairement différent d’une surface plane, et il faut un temps d’adaptation pour comprendre les gestes et les outils du tatouage. Mais le corps dans toute sa complexité est aussi une toile infinie et inégalable qui permet de jouer sur ses courbes, les placements.. je pense qu’après 20 ans de tatouage, on est encore surpris par les possibilité de création qu’il nous offre.
J’utilise les POSCA pour leurs noirs profonds et mats. Avant de me mettre au tatouage, j’utilisais aussi les gammes colorées que je trouvais top, et depuis que je ne travaille qu’en noir je combine les PC-1M pour les contours, les PC-5M pour les aplats et beaucoup de calibres de PIN pour les détails, particulièrement le 0.05 que j’utilise pour le dot, et le blanc me sert à corriger et rehausser certaines zones !