Ernesto Novo est un artiste peintre dont on suit les aventures régulièrement. Il réside et travaille à Paris, voyage régulièrement pour partager son travail et participe à des actions bénévoles pour des œuvres humanitaires, ou dans ce cas précis le GHU de Paris.
Actuellement en résidence au Python, un ensemble HLM à la porte de Bagnolet à Paris, il partage un atelier avec Sifat dans un immeuble qui sera bientôt détruit. Cité enclavée, résidents souriants, c’est par une belle après-midi ensoleillée que l’on a discuté en digressant.
Ernesto nous explique, calmement et avec précision :
« C’est Jérémie qui m’a contacté, un ami, il est psychomotricien pour le GHU de Paris et travaille en neurologie, il est aussi artiste. Il m’a sollicité pour un projet à l’hôpital Saint-Anne, qui est un établissement psychiatrique et neurologique. Un bâtiment allait être détruit, c’était l’occasion d’y faire des ateliers pendant quelques jours.
C’était après le premier confinement, en 2020, donc un moment pas évident. Il n’y a eu qu’une seule journée où le public a pu venir voir les œuvres, les artistes et les intervenants sont aussi venus, c’était une sorte de vernissage. Le projet était intitulé « Le jour d’après », on peut d’ailleurs retrouver sur Youtube une longue vidéo qui résume ce moment. »
Comme il aime le préciser, Ernesto travaille lentement, détails obligent, il aime aussi s’imprégner des lieux et les détourner quand il en a l’occasion :
« J’ai bossé deux semaines, bénévolement, et l’association Riofluo de Skio a géré l’organisation. Je pouvais faire ce que je voulais, donc j’ai cassé des murs, j’ai tout peint en rose et ensuite j’ai réalisé des portraits. J’ai choisi de rendre hommage au personnel soignant, car c’était un moment très difficile pour eux. J’ai peint les visages des infirmiers avec masques et sur le mur opposé sans masques.
Je trouvais intéressant de faire un lien entre deux mondes, avec et sans covid. Dans le milieu de la santé on travaille beaucoup avec l’humain, et moi je travaille avec l’humain. Il y avait aussi les artistes Sitou et Alexandra Petracchi qui ont réalisé des œuvres. Jérémie, lui, faisait une fresque à l’entrée du pavillon. »
Pendant ces deux semaines, des groupes de patients avec leurs thérapeutes ont aussi créé sur le site, un moment où il y avait des mesures sanitaires en vigueur qui ne facilitaient pas les choses. L’artiste enchaîne et explique le rôle des soignants et accompagnateurs des malades :
« Le personnel passait nous voir, participait, dessinait. On a aussi croisé des patients, ceux qui viennent pour la journée, ils ont pu dessiner et créer, et exposer des dessins, des sculptures et des textes, encadrés par des soignants.
Il y a un truc qui m’est resté, certains patients évoquaient par exemple le bruit d’une porte qui se ferme, et eux, ils savent de quoi ils parlent car ils étaient de plus en plus enfermés à cause du Covid. Toutes les activités et les sorties ont été annulées pendant cette période. C’est déstabilisant. »
Et si Ernesto a bourlingué et peint dans des situations extrêmes ou rocambolesques, c’était la première fois qu’il évoluait dans un environnement où le handicap bouscule la norme et peut faire vaciller le rationnel :
« Ce n’est pas facile de peindre dans ce genre d’environnement, mais il y a toujours des référents qui encadrent les patients, qui gèrent les situations. Je sais qu’il peut y avoir des couleurs ou des formes qui peuvent être perturbantes, on n’a pas tous les codes. Je n’avais pas l’habitude, mais l’art ça te permet de rigoler avec les patients, de parler, de dédramatiser les situations.
Il y avait ce monsieur d’un certain âge, retraité, qui avait les membres très affaiblis, donc en fauteuil roulant. Il ne pouvait plus dessiner, alors qu’il s’était installé un atelier pour sa retraite. On a fabriqué un tube et on a ajouté un POSCA au bout, il a pu peindre un petit peu, colorier. Ce genre de projet, c’est des grands moments de partage. »
Le Groupe Hospitalier Universitaire Paris psychiatrie & neurosciences a été créé en 2019, né du rapprochement des hôpitaux Maison Blanche, Perray-Vaucluse et Sainte-Anne. Il regroupe 170 structures réparties sur 94 sites qui couvrent l’ensemble du territoire de santé de la capitale. Avec une file active de 60 000 patients, c’est 1 parisien sur 40 qui a recours à ses services.
Du 7 au 11 septembre 2020, après la premier confinement, une expérience unique s’est déroulée pavillon Janet, au cœur du site Sainte-Anne, siège du GHU Paris. Dans un lieu voué à la démolition pour y construire le futur bâtiment des neurosciences de l’hôpital, patients, usagers, professionnels de santé, street-artistes, parfois les deux en même temps, sont venus inventer le « jour d’après ». Où comment se libérer des émotions suscitées par la covid grâce à la création, à l’art, au partage.
Une trentaine de services du GHU, tous lieux d’exercice et spécialités confondues, se sont prêtés au jeu. Plus d’une centaine d’usagers a tenu la bombe à peinture, le pinceau, l’appareil photo… Une œuvre éphémère et collective forte, qui s’est ancrée durablement dans le souvenir de ses auteurs, et qui augure de lendemains meilleurs.
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